Benoit PINERO

NEBULA LIGER/UN FLEUVE À SOI

25 avril 2025 > 12 mai 2025

Benoit PINERO

Chercheur, photographe-auteur et opérateur culturel, Benoit Pinero allie les arts et les sciences, la connaissance et la création, pour imaginer des expériences en prise avec les grands enjeux sociaux et politiques contemporains. La rencontre avec Bruno Latour et son équipe au sein du programme d’expérimentation en arts politiques – Speap/Sciences Po – a été le point de départ d’une démarche hybride où s’articulent les outils de l’enquête de terrain, les principes de l’auto-description et des recherches formelles. Benoit intègre la photographie dans toutes ses pratiques, que ce soit pour documenter une enquête, poser un regard critique ou décrire un état sensible du monde. Il croit dans la capacité du récit photographique à changer nos représentations, en faveur d’une plus grande attention aux êtres et aux choses qui nous entourent.

NEBULA LIGER/UN FLEUVE À SOI

  • Nebula Liger / Un fleuve à soi est le récit d’un apprentissage du fleuve au travers d’explorations qui ont conduit Benoit Pinero à connaître intimement sa topographie, ses îles, ses berges, ses sédiments, sa flore et sa faune. Ses cheminements réguliers et hasardeux ont rompu la distance entre regardeur et regardé ; l’artiste dit être « entré en paysage ». Dans l’exposition immersive, le visiteur-arpenteur est volontairement désorienté, il est invité à déposer son héritage de regardeur, à changer de point de vue et à cheminer lui aussi à travers l’espace. « Un fleuve à soi est une enquête hasardeuse, hésitante, par, avec et dans le brouillard. Loin d’être une entité neutre, ce dernier est ici investi d’une réelle puissance d’agir. Nous avons tous fait l’expérience de la façon dont ce météore insaisissable modifie notre perception. En troublant la vue, atténuant les sons et masquant les repères, il nous déstabilise, détourne notre regard, lui impose l’invisible. En cela, il nous conduit à renoncer à une part de nos habitudes, de notre héritage culturel d’espèce regardeuse. Le brouillard serait une forme d’orthèse, une béquille visuelle pour ré-apprendre à voir, à re-connaître, à re-composer une connaissance sensible de ceux qui nous entourent. Considérer chaque élément pour ce qu’il est, et tenter de comprendre en quoi il nous importe. En ouvrant un espace-temps autre, le brouillard nous force à être et agir en « terrestres ». Le ciel, écran de nos imaginaires, de nos fantasmes d’évasion, disparaît. La masse nébuleuse collée au sol bouche notre horizon, annihile toute perspective, elle nous ramène au sol. Nous n’avons d’autre choix que d’entrer en paysage, d’arpenter, de rôder à ras de terre, de baisser les yeux pour considérer ce que nous ne prenons jamais la peine de voir, de prendre garde à l’obstacle invisible, de humer les exhalaisons fumantes, de sentir le poids minéral de la terre sous nos pieds, la charge de nos pas alourdis par des paquets de brume collante.